Crédit : Jean-Marc Guillou
Une première question classique : comment êtes-vous venu au football ? Quels sont vos premiers souvenirs ?
Jean-Marc Guillou : J’ai appris à jouer au football en Allemagne à 5-6 ans où avec mon frère, Alain, qui a 3 ans et 9 mois de plus que moi, on faisait des matchs internationaux avec ou contre les jeunes Allemands. J’étais certainement le plus jeune lors de ces parties, mais je tenais bien le ballon et les adversaires étaient moyens. On en a gagné de ces petits matchs ! Je dois expliquer pourquoi nous étions en Allemagne, mon père étant gendarme toute la famille l’avait suivi en ces temps d’occupation française dans certaines villes de l’Allemagne de l’Ouest. Puis, vers mes dix ans, nous sommes revenus en France où mon père a été affecté à Couëron une petite ville proche de Nantes. J’ai joué une multitude de matchs toujours avec Alain, mais aussi avec une dizaine d’autres garçons de la cité, tous plus vieux que moi. On se mettait à deux pour faire les équipes en choisissant un joueur chacun à son tour et il était rare que je sois retenu le dernier. Nous n’avions aucun entraîneur. Ces matchs avaient lieu au retour de l’école mais surtout le jeudi et le dimanche où nous étions en vacances.
J’ai appris avec mon frère et avec les autres principalement lors de ces petits matchs où j’ai profité d’être le plus jeune pour jouer de manière intelligente, je n’avais pas le choix car tous mes adversaires allaient plus vite que moi et étaient plus puissants que moi. Et lorsque deux de nos camarades faisaient les équipes j’étais, surtout quand c’était à Alain de choisir les joueurs de notre équipe, souvent choisi en premier.
Question connexe : comment avez-vous appris à jouer ?
J.-M. G. : Dans la cour de l’école, le ballon était un caillou plus ou moins rond. Le plus souvent, c’est moi qui choisissais ce caillou, suffisamment rond, en chemin vers l’école. Et à chaque récré les chaussures en prenaient un coup et ma mère était toujours très étonnée par la vitesse à laquelle je cassais mes chaussures. Alain lui, n’a pas joué avec les cailloux, il était plus précautionneux que moi avec son habillement et ses chaussures et il était un adolescent et hors de l’école plus intéressé par les filles.
Dans la cité où nous habitions, il y avait le terrain de football où jouait le dimanche le meilleur club de la ville ESC (l’Étoile Sportive de Couëron). Quand l’équipe jouait sur ce terrain nous passions par un endroit où les planches qui entouraient le terrain étaient cassées et nous permettaient de rentrer sans payer. Albert Guessoum le super joueur de ma jeunesse jouait dans ce club. C’était mon idole et lorsqu’il s’échauffait avant le match sur le terrain de basket, je le regardais sans le quitter des yeux, c’était mieux qu’un entraîneur, car lors de ces matchs ou échauffement, il faisait toujours la décision, cela n’a pas duré car le FC Nantes, club de Seconde division à l’époque, lui a fait signer un contrat.
Puis, mon père en a eu marre de la gendarmerie. Il faut dire qu’il avait connu pendant la guerre 39-45 où nous étions en Allemagne d’autres aventures en s’étant enrôlé avec le commandant de sa brigade dans la Résistance, et la platitude du métier de gendarme à Couëron était bien loin des aventures de ces quelques gendarmes menés par leur commandant, un dénommé Rico, tué malencontreusement par d’autres résistants les prenant pour des Allemands.
En quoi consistait votre premier équipement de footballeur ?
J.-M. G. : Des chaussures avec des bouts durs, des ballons avec des lacets. La marque à l’époque qui était en avance était « Les Raymond Kopa », puis il y a eu plus tard un modèle, dont je ne me souviens plus du nom, de la marque « Adidas ».
À partir de quel âge avez-vous commencé à évoluer au milieu de terrain ?
J.-M. G. : J’ai toujours joué au milieu de terrain, sauf dans les dernières années quand j’étais entraîneur-joueur où je jouais derrière en couverture mutuelle, c’est-à-dire sans libéro.
Quand avez-vous imaginé pouvoir faire du football un métier au lieu de la chaudronnerie ?
J.-M. G. : J’ai toujours pensé que je serai un jour, un joueur professionnel.
Vous avez accompli une bonne partie de votre carrière au SCO Angers. Pouvez-vous nous décrire le club, le rapport de la ville à son équipe de football, les rapports entre joueurs et supporters ?
J.-M. G. : Oui, j’y ai joué pendant presque dix ans. C’était un club tranquille un peu comme la ville. Dernièrement le football a beaucoup changé. À l’époque la ville subventionnait comme pour toutes les villes françaises. La municipalité était les financiers des clubs. Dans cette ville et avec les joueurs et entraîneurs qui se sont succédé, j’ai vécu comme la ville, tranquille. La victoire était recherchée, mais le jeu était un peu la copie du jeu nantais avec une grande notion du collectif.
Pour le moment cela semble encore le cas, je suis heureux de voir le club remonter en Division 1. Ce sera dur d’y rester. Mais au moins pour une année ils y sont. Les rapports avec les supporters sont je pense un peu les mêmes. Pour finir, lorsque la mairie était encore les financiers principaux du temps de l’entraîneur yougoslave Velibor Vasovic, ce dernier connaissait l’entraîneur du Real de Madrid et il lui avait parlé de moi en très bons termes. Si bien que le club d’Angers a reçu une proposition du Real de Madrid, à l’époque 100 millions [de francs]. La municipalité a refusé, ne voulant pas me laisser partir, le club s’est plié, il ne pouvait pas boucler son budget sans elle…
Le SCO était aussi réputé pour son beau jeu ? Était-ce lié au passage et à l’émergence de Raymond Kopa dans les années 1950 ? À une philosophie de jeu transmise par les entraîneurs ?
J.-M. G. : Nous avons eu de bons entraîneurs avec le SCO, Lucien Leduc fut l’un des meilleurs. Cela a coïncidé avec une période où il y avait de très bons joueurs, cela a fait la réputation du jeu de l’équipe du SCO d’Angers. Raymond Kopa de mémoire n’a pas joué assez longtemps avec le SCO pour avoir eu cet effet. Le fait qu’une équipe joue bien tient à un bon entraîneur avec au moins huit bons, voire très bons joueurs sur le terrain. Le fait que cette équipe ou ce club tienne plusieurs saisons dépend de l’entraîneur. Il faut qu’il soit bon et qu’il fasse lui-même son recrutement.
Vous y êtes resté longtemps alors que vous aviez sans doute des propositions ? Était-ce un choix de carrière, de jeu, de vie ? Qu’est-ce qui vous a fait partir pour l'OGC Nice ?
J.-M. G. : J’ai eu en effet des propositions, le Real, le PSG d’Hester, aller à Nice était un choix de vie.
L’OGC Nice était une équipe avec un effectif particulièrement brillant, qui jouait un beau football mais n’a pas remporté de trophée. Elle était souvent cantonnée au titre de championne d’automne. Pourquoi ce goût d’inachevé à l’époque des Verts et des débuts de Michel Platini ?
J.-M. G. : L’entraîneur Vlatko Markovic était fâché avec le football. Encore une fois, intervient le fait qu’une bonne équipe c’est une équipe qui aligne dans les matches au moins huit bons ou très bons joueurs.
Vous avez été sélectionné en équipe de France seulement de 1974 à 1978 et contribué au renouveau des Bleus. Cette reconnaissance tardive a-t-elle un lien avec le jeu préconisé par Georges Boulogne ? Quel souvenir gardez-vous de Stefan Kovacs qui vous a fait enfin venir parmi les Bleus ?
J.-M. G. : Georges Boulogne était lui aussi fâché avec le football. Il n’a à ma connaissance jamais joué en tant que joueur professionnel et, dans ses sélections, il n’atteignait pas le chiffre des huit bons ou très bons joueurs. Stefan Kovac connaissait lui le football, il savait aussi être politique tout cela avec beaucoup d’humour.
Vous avez participé au fameux France-Bulgarie de novembre 1977. Quel souvenir en gardez-vous ?
J.-M. G. : Nous avons joué du mieux possible. En ce qui me concerne, j’ai fait tout ce que j’ai pu pour que notre équipe se qualifie.
Et la Coupe du monde en Argentine sous Videla ?
J.-M. G. : Beaucoup de joueurs étaient sensibles à ce qui se passait à cette époque en Argentine. Nous avons fini par décider de jouer avec un bandeau noir et dire à la presse que nous étions solidaires avec les personnes emprisonnées.
Pendant la Coupe du monde 1978, il y a eu l’affaire des chaussures. Est-ce que vous avez eu des contrats avec des équipementiers quand vous étiez joueur et comment ces accords étaient négociés et signés ?
J.-M. G. : Non je n’ai jamais eu de contrat avec un équipementier. L’affaire des chaussures était simple. Le groupe des sélectionnés a voté pour désigner trois représentants : le plus capé (Henri Michel), l’un des plus vieux, moi, et le plus talentueux, Michel Platini. Tous les sélectionnés étaient d’accord pour peindre en noir les 3 bandes Adidas car ils n’étaient pas satisfaits des conditions financières proposées par l’équipementier. Mais le jour venu peu d’entre eux avaient apporté le cirage noir. François Remetter, qui était le représentant d’Adidas, m’a fait porter le chapeau. Mon avenir dans cette équipe de France était quasiment nul.
Quel était le niveau de rémunération d’un joueur de votre calibre ? Celui d’un cadre supérieur ? Quel patrimoine pouvait s’être constitué un joueur s’il avait su épargner raisonnablement ?
J.-M. G. : À Nice j’ai perçu chaque mois environ 4 millions de francs1 plus les primes dont je ne me rappelle pas le montant. Le football ce n’était pas autant d’argent dans les années 1970-1980.
Le patrimoine ? Je n’en avais pas. À l’époque, on ne savait pas vraiment investir et on n’était pas forcément bien conseillé. J’avais mis mon argent dans un restaurant corse, qui a fini par brûler. Je l’ai perdu. J’ai surtout investi mon argent dans le football : dans le TopScore à la fin des années 1980 (un système de lecture des matchs qui donnait un indicateur de performance offensif et défensif par équipe et par joueur basé sur une attribution de bonus/malus de toutes les actions de jeu que nous saisissions à la main à partir des images des matchs et qu’on avait revendu un temps à TF1 et à quelques clubs), puis dans l’Académie MimoSifcom, puis dans Beveren en Belgique, puis dans le Paris FC. Des investissements qui n’ont pas tous été rentables. Enfin, dans mes projets d’académies en mon nom propre en Afrique, à Bamako puis en Côte d’Ivoire. Une académie commence à rapporter de l’argent au bout de 6-7 ans en moyenne, il faut donc un peu de fonds propres, se rembourser avant d’en gagner… Ah oui, j’ai aussi investi récemment dans un projet de formation de jeunes pour créer un vrai championnat de jeunes en Côte d’Ivoire en partenariat avec la Fédération ivoirienne (projet C jeune), mais cela n’a pas abouti, c’est dommage pour les enfants et le football ivoirien, et la Fédération me doit encore de l’argent.
Et les automobiles dont les joueurs d’aujourd’hui sont friands ?
J.-M. G. : Je n’ai jamais dépensé beaucoup d’argent dans les automobiles. Quand j’étais à l’OGC Nice, j’avais une Peugeot 504.
Le rapport avec les journalistes était aussi différent ?
J.-M. G. : Beaucoup de journalistes ont été très sympas avec moi notamment, Christian Montaignac, devenu un ami, Robert Vergne et Jacques Ferran avec qui je jouais aux échecs par correspondance.
Après Nice, vous avez joué pour le Xamax. Est-ce que vous avez découvert des pratiques et une culture footballistiques différentes ?
J.-M. G. : Déjà il pouvait y avoir des entraîneurs-joueurs, alors qu’en France ce n’était plus permis. Autrement, le football est à peu près le même partout. Je me suis régalé avec cette équipe cela a été probablement, avec l’Académie MimoSifcom, la période de foot la plus sympa de ma vie. J’y ai rencontré certains de mes meilleurs amis, notamment Serge Trinchero. À nous deux, on cumulait près de 70 ans mais on tenait la défense, personne ne passait ! J’ai continué avec Mulhouse toujours comme entraineur-joueur et nous sommes montés en Première division.
Vous y êtes ensuite devenu entraîneur. Était-ce pour vous une prolongation naturelle de votre métier de joueur et avec quelle formation ?
J.-M. G. : La prolongation naturelle en Suisse c’est justement d’être entraîneur-joueur. J’ai pris exemple sur les meilleurs entraîneurs que j’ai connus, Leduc, Batteux, Vasovic. La part de la formation fédérale a été mince. On joue au football depuis longtemps mais tous les métiers ont un vocabulaire et une technologie sauf pour devenir entraîneur de foot. Je me suis donc construit un vocabulaire sur le foot pour en parler avec mes joueurs, le même que j’ai fait apprendre aux jeunes joueurs de Côte d’Ivoire, qui tous savent parler football.
Vous avez toujours préconisé le beau jeu comme à Mulhouse. Cette aspiration à produire du spectacle vous a-t-elle conduit à être en opposition à des dirigeants qui se voulaient plus réalistes ?
J.-M. G. : Non et oui, mais il faut définir quel est le beau jeu. J’ai personnellement une définition : le beau jeu est celui qui respecte le jeu et tous les participants à un match tout en étant efficace pour son équipe. Le beau jeu devrait être exempté de violence, d’attentat, mais aussi à l’inverse, de cinéma. Aruna Dindane nous racontait récemment combien je leur avais inculqué ce sens du respect du jeu. À l’Académie MimoSifcom d’Adidjan à 17 heures, après une journée d’exercices, de repos et d’école, c’était l’heure des matchs. Les gamins passaient le meilleur moment de la journée mais ils le vivaient dans la crainte de se faire sortir et de devoir filer à la douche. Voilà ce qu’il disait : « On jouait mieux à l’Académie que partout dans ma carrière, c’était fluide, c’est là où j’ai joué le meilleur football. Quand tu ne respectais pas le jeu, tu partais à la douche et ça c’était la punition ultime ! 17 heures, le seul moment où tu prenais du plaisir après tous les exercices de la journée. Le gars, il passe dans le dos, il faut que tu lui donnes. Moi j’ai gardé ça, c’est pour ça que l’on disait que j’étais au service de Drogba, mais j’étais au service du jeu. ».
Qu’est-ce qui vous a conduit à poursuivre votre carrière en Côte d’Ivoire ? La liberté de pouvoir développer votre méthode ? Un potentiel encore inexploité ?
J.-M. G. : Quand j’entrainais L’AS Cannes en Seconde division dans la plupart des équipes contre lesquelles on jouait, on trouvait dans leur équipe un ou deux Africains et ces joueurs étaient presque toujours décisifs dans les matches. Alors j’ai dit à Richard Conte, directeur sportif de l’époque : « Je crois que je vais faire un tour en Afrique et recruter un ou deux joueurs capables de bonifier notre équipe. » J’ai ramené Yousouf Fofana un joueur ultrarapide et bon techniquement qui a été cédé à Monaco la saison d’après. J’avais ainsi pris contact avec l’ASEC d’Abidjan. Quand j’ai voulu faire de la formation en France, je me suis heurté à un système très fermé et cloisonné. Georges Boulogne, à qui je faisais part de mes insatisfactions du système, m’a mis au défi de m’y mettre. L’Afrique m’apparaissait comme pleine de ressources et offrant plus de liberté d’entreprendre.
Avec l’Académie MimoSifcom d’Abidjan, vous avez innové tant par les méthodes de formation de joueurs que par le choix d’abord technique à un moment où les joueurs africains sont d’abord recherchés pour leur dimension physique ? Même si l’on voit évidemment la patte du joueur que vous étiez, comme avez-vous élaboré ce projet ?
J.-M. G. : Lors du voyage en Afrique j’ai vu sur les terrains vagues des quartiers d’Abidjan plein de talents et je me suis dit : c’est là qu’il faut que je vienne pour faire de la formation. Tout était dans ma tête. Je n’avais pas la mémoire de tous les talents que j’avais vus mais avec Lambert Amuah, qui est devenu mon second dans cette aventure, nous sommes allés dans tous les quartiers (quelques quartiers sont venus à nous). Et nous avons recruté une dizaine de jeunes en les réunissant sur les terrains d’un club avec lequel nous avions un partenariat Nous étions en 1993…
C’est vrai que je ne recherche pas le physique en premier. De toute façon en Afrique, quand les gamins ont 10-12 ans, ils sont tous gringalets, ce n’est pas comme ici en Europe, ils ne bénéficient pas des mêmes conditions de croissance. Bien sûr, on remarque des physiques singuliers, mais c’est plus rare, les enfants se développent plus tardivement. Alors oui, à l’Académie, on a eu des très très bons joueurs qui n’étaient pas très grands. Car on les sélectionne sur autre chose : l’intelligence de jeu, la technique, l’agilité, l’anticipation, la volonté, l’endurance, le respect.
Cependant on a vite fait la différence ! Même l’équipe première de l’ASEC avait fini par ne plus vouloir jouer avec nous ! L’équipe réserve dépassait la première ! En 1999, avec une équipe composée pour au moins toujours de huit joueurs sortis de l’Académie, nous avons battu l’Espérance de Tunis par 3 buts à 1 et gagné la Super Coupe d’Afrique. Cela a été l’un des plus beaux moments de ma carrière de formateur.
Vous avez été ensuite suivi par des joueurs, des clubs européens et les académies et autres centres de formation ont essaimé en Afrique. Quel regard portez-vous sur cette activité aujourd’hui ?
J.-M. G. : Oui, on compte aujourd’hui beaucoup d’« académies » en Afrique ! Il faut réveiller l’Afrique pour qu’une des équipes nationales africaines gagne la Coupe du monde. J‘ai déjà réfléchi pour les réveiller ici en Côte d’Ivoire. Il faut aller plus loin avoir le soutien d’une fédération et faire ce qui manque dramatiquement dans tous ces pays : organiser des compétitions pieds nus par catégories de poids pour éviter la triche sur les âges. Faire une réglementation nouvelle (Bonus-Malus) des tournois de jeunes notamment en accordant à l’équipe qui gagne par trois buts d’écart 3 points et -1 à l’équipe qui perd, 2 points à l’équipe qui gagne [par un écart plus faible], 0 à celle qui perd [par moins de trois buts d’écarts].
Je pense aussi qu’il faudra modifier les règles financières des transferts, car les clubs africains qui ont des bons joueurs n’ont pas les moyens des clubs européens. J’avais proposé un autre système aux instances et j’aimerais faire avancer cette idée en Afrique. Ce ne sera pas simple car les fédérations sont tenues par les règles internationales.
Pouvez-vous nous dire un mot de votre expérience de Beveren en association avec Arsenal ?
J.-M. G. : Alors un mot. Une réussite. Au final. J’y suis arrivé comme manager général, j’y ai fait entrer un des meilleurs clubs d’Angleterre (Arsenal) et je suis parti au bout de 5 ans en laissant le club en très bonne santé financière et sportivement nous sommes restés en Première division et avons joué la finale de la Coupe de Belgique ce qui nous a qualifiés pour la coupe de l’UEFA. La Belgique avait l’avantage de ne pas avoir de limites en matière de joueurs étrangers.
Mais cela n’a pas été sans mal, c’est vrai avec un conseil d’administration en flamand et en anglais. Pour autant que je m’en souvienne, Arsenal avait 40 % et moi 15-20 % des parts. Avec Arsenal, je maîtrisais les décisions du club ; je faisais venir les joueurs de l’Académie MimoSifcom de Côte d’Ivoire. J’étais aussi précurseur de ce qui se fait aujourd’hui où de nombreux clubs européens s’allient des centres de formation africains. Tant qu’on gagnait, une équipe d’étrangers, même noirs, dans une région de couleur politique plutôt anti-étrangers, cela passait, même très bien. Comme quoi le football a toujours eu ce pouvoir rassembleur. Mais on a eu du mal à la fin parce qu’on avait vendu nos bons joueurs et là la couleur de l’équipe faisait grincer des dents, jusque Michel Platini qui ne trouvait pas cela des plus « normal », cette équipe si « étrangère »…
Cela a été pour moi cependant beaucoup, beaucoup de stress, car, à la fin, j’étais sur la sellette sur tous les matchs. J’étais tellement nerveux sur le banc que j’ai dû le quitter ! C’est probablement là, que j’ai développé mon arythmie cardiaque que j’ai eu la chance de voir traiter au mieux récemment par le docteur Lanfranchi, spécialiste de chirurgie cardiaque.
Quel regard portez-vous sur le football d’aujourd’hui ? Seriez-vous favorable à une Superligue ?
J.-M. G. : Pas vraiment. Je trouve cela contraire à l’esprit de la compétition qui veut que les plus forts montent et que les plus faibles soient relégués. Et puis cela crée une sorte d’oligarchie du football, d’ailleurs que les supporters, en gros les citoyens du football, ne plébiscitent pas.
Quand toutes les équipes auront comme le Manchester City de Guardiola, les mêmes moyens et la même philosophie, alors une super ligue naîtra d’elle-même, mais ce n’est pas pour demain.
Dans le même ordre d’idée, quel est votre regard sur la VAR remise en cause aujourd’hui ? Est-ce que vous auriez aimé en bénéficier en tant que joueur ?
J.-M. G. : Oui, mais je vais aller plus loin : je pense que nous devons passer à la dernière étape celle où le véritable arbitre est l’arbitre vidéo qui décide. L’arbitre du terrain siffle quand le véritable arbitre le lui dit et ce dernier, c’est l’arbitre vidéo. Ensuite, il est accompagné de deux assistants pour remontrer éventuellement les actions en images. Pour cela il faut que les arbitres vidéo passent un diplôme où il s’agit d’arbitrer un match. Il sera jugé sur le nombre de faute(s) faites par lui au-delà de quinze fautes, il sera éliminé. De plus, l’arbitre ne connaîtra pas le match qu’il va arbitrer et les clubs ne connaîtront pas qui va les arbitrer.