L’image projetée du « Latino » dans la série One day at a time (Au fil des jours)

  • The projected image of the “Latinos” in the series One day at a time
  • La imagen proyectada del “latino” en la serie One day at a time (Un día a la vez)

Partant du constat que de nombreux étudiants arrivent à l’Université avec des images préconçues très ancrées concernant l’Amérique latine, j’ai décidé de m’intéresser à l’un des canaux de diffusion des préjugés sur le sous-continent et ses habitants. De la sorte, cet article propose une étude de l’image « projetée », c’est-à-dire des représentations offertes de la « communauté latino » dans la version doublée en français d’une série états-unienne (One day at a time).
Le visionnage des épisodes des saisons diffusées en France permet de confirmer que les mondes anglo-saxon et « latino » restent deux voisins qui s’ignorent. Le cœur du travail repose sur une mise en exergue des quiproquos nés de la méconnaissance, ainsi que des stéréotypes diffusés.
Sans prétendre à l’exhaustivité, nous nous attacherons donc à comprendre quelle image du « Latino » est transmise par la série étudiée. Pour ce faire, nous verrons dans un premier temps que la Révolution cubaine et l’Amérique latine sont pour les États-Unis deux nébuleuses qui interrogent. Nous montrerons en outre que, sous un angle politique marqué et une vision très négative de la Révolution cubaine, une réflexion s’engage également sur le système politique états-unien, et sur les liens entre les différents pays du continent américain.
En deuxième lieu, nous évoquerons l’éventail des stéréotypes se rapportant à la communauté latino et observables dans la série, en insistant sur les deux points de vue qui nous sont proposés : celui des États-Unis, mais également le regard supposé de la communauté latino sur elle-même.
Enfin, nous nous intéresserons au racisme et aux discriminations induits par la migration, ainsi qu’à l’acceptation ou au rejet de la communauté immigrée par la communauté d’accueil, qui conditionnent l’acceptation ou le rejet de l’héritage culturel et identitaire.

Given that many students arrive at university with deep-rooted preconceptions about Latin America, I decided to look at one of the channels through which prejudices about the subcontinent and its inhabitants are disseminated. In this way, this article proposes a study of the “projected” image, i.e. the representations offered of the “Latino community” in the French version of a US series (One day at a time).
Viewing the episodes of the seasons that were broadcast in France confirms that the Anglo-Saxon and “Latino” worlds remain two neighbours who ignore each other. The heart of the work lies in highlighting the misunderstandings that arise from this lack of knowledge, as well as the stereotypes that are disseminated.
Without claiming to be exhaustive, we will endeavour to understand what image of the “Latino” is conveyed by the series under study. To do this, we will begin by showing that the Cuban Revolution and Latin America are unknown process and space for the United States. We will also show that underneath a marked political angle and a highly negative vision of the Cuban Revolution, a deeper reflection is emerging on the US political system and on the links between the different countries of the American continent.
Secondly, we will discuss the range of stereotypes observable in the series alongside the Latino community, focusing on the two points of view that seem to be offered: that of the Americans, but also the Latino community’s supposed view of itself.
Finally, we will look at the racism and discrimination induced by migration, and the acceptance or rejection of the immigrants in the community of arrival, which conditions the acceptance or rejection of the cultural heritage and identity.

Dado que muchos estudiantes llegan a la universidad con ideas preconcebidas muy arraigadas sobre América Latina, decidí estudiar uno de los canales a través de los cuales se difunden los prejuicios sobre el subcontinente y sus habitantes. De este modo, este artículo propone un estudio de la imagen “proyectada”, es decir, de las representaciones que se ofrecen de la “comunidad latina” en la versión francesa de una serie estadounidense (One day at a time).
El visionado de los episodios de las temporadas emitidas en Francia confirma que los mundos anglosajón y “latino” siguen siendo dos vecinos que se ignoran mutuamente. El núcleo del trabajo reside en la puesta de realce de los malentendidos que se derivan de este desconocimiento, así como de los estereotipos difundidos.
Sin pretender a un estudio integral, intentaremos comprender qué imagen del “latino” transmite la serie analizada. Para ello, veremos en primer lugar que la Revolución Cubana y América Latina son dos temas confusos para Estados Unidos. Demostraremos también que bajo una marcada perspectiva política y una visión muy negativa de la Revolución Cubana, emerge una reflexión sobre el sistema político estadounidense y los vínculos entre los distintos países del continente americano.
En segundo lugar, analizaremos el abanico de estereotipos de la comunidad latina que se observan en la serie, centrándonos en los dos puntos de vista que parecen ofrecerse: el de Estados Unidos, pero también la supuesta visión que la comunidad latina tendría de sí misma.
Por último, examinaremos el racismo y la discriminación inducidos por la migración, y la aceptación o el rechazo de la comunidad inmigrante en la comunidad de llegada, que condicionan la aceptación o el rechazo de la herencia cultural e identitaria.

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Ce travail se propose d’étudier l’image du « Latino », particulièrement auprès du public francophone, dans une série états-unienne. En effet, constatant que nombre d’étudiants arrivaient à l’Université habités de clichés sur le monde latino-américain, j’ai souhaité comprendre quels mécanismes aboutissaient à un tel état de fait, et me suis aperçue que les séries nourrissaient pour partie la perception stéréotypée de l’Amérique latine au sein de la communauté étudiante actuelle.

Cet article a donc pour but d’étudier l’image « projetée », c’est-à-dire la représentation qui est faite d’une communauté à travers un médium de grande consommation. Il faut d’emblée rappeler que les séries ont un impact sur le public, qui est loin d’être passif et interagit avec la série visionnée. Si l’on en croit Stuart Hall, chaque spectateur aura sa propre lecture d’une série, soit en acceptant pleinement les messages qu’elle diffuse, soit en les remettant partiellement en cause, soit en les rejetant totalement (Chane et al. 2022 : 131). Selon d’autres études, le spectateur sélectionnera uniquement les informations qui l’intéressent, et les investira en fonction de son état d’esprit et de son degré d’implication au moment du visionnage (Tomb 2017 : 37). De la sorte, à travers les personnages et les situations que la série propose à l’analyse du spectateur, elle constitue un rouage de la fabrique des imaginaires collectifs. Elle accorde en outre une visibilité, face à une invisibilité structurelle, à des communautés oubliées ou mises à la marge, mais elle véhicule également des images, qu’elle conforte ou combat.

Si la distinction entre stéréotype, cliché, poncif, ou encore lieu commun n’est pas toujours nette (Amossy 1989 : 29), la définition du stéréotype qui guidera ce travail est la suivante :

La notion de stéréotype permet d’analyser le rapport de l’individu à l’autre et à soi, ou les relations entre les groupes et les membres individuels. Née de l’imprimerie et donc issue de la culture de la reproduction, la notion de stéréotype est utilisée dans le langage commun dans une acception péjorative (une idée « à l’emporte-pièce ») […]. Le stéréotype entre dans les mécanismes fondamentaux de construction des connaissances […]. Produit d’une réduction d’information, le stéréotype est une médiation qui permet de comprendre quelque chose de nouveau par l’intermédiaire d’une représentation simplifiée : sa dimension sociale est arrimée à sa dimension technique (Georges 2011 : 31).

Notre article porte sur la série One day at a time, intitulée Au fil des jours dans sa version française, une comédie de situation ou sitcom. On peut dire avec Stéphane Partel (2020) que ce type de production audiovisuelle contribue à divertir une audience large grâce à des situations comiques, tout en répondant à certaines « conventions » (les rires du public ou les mimiques des acteurs par exemple). Mais on notera également que des articles dans des médias contributifs (Reyes 2018) ont dépeint la série comme « nécessaire », car « [offrant] un portrait réaliste des Latinos, qui sont généralement représentés au cinéma et à la télévision comme des membres de gangs ou des domestiques, ou aux informations comme des immigrés sans papiers »1. On peut même dire que l’audience d’origine latino-américaine a manifesté sa satisfaction de voir représentés dans la série des personnages certes parfois caricaturaux, mais s’éloignant des clichés autour de la narco-criminalité (Avilés-Santiago 2019 : 72).

La série étudiée (remake du feuilleton éponyme diffusé entre 1975 et 1984 à la télévision états-unienne) a été produite et tournée aux États-Unis. Elle a été diffusée pour la première fois entre janvier 2017 et février 2019, via Netflix. La diffusion, notamment via ce canal – et donc à un niveau mondial – permet d’imaginer qu’elle a touché un grand nombre de spectateurs.

Un premier visionnage de la série permet d’observer que les préjugés constituent un ressort comique de la narration et de supposer que la volonté des créateurs de la série2 était peut-être d’amorcer, sous couvert de l’humour, une réflexion sur des sujets sérieux.

De ce fait, nous verrons dans un premier temps que Cuba, sa révolution et l’Amérique latine semblent être pour les États-Unis des nébuleuses qui interrogent. Nous constaterons en outre que, à travers un angle politique marqué et une vision très négative de la Révolution cubaine, nous sont proposés des éléments pour une analyse plus profonde du système politico-social états-unien, et des liens entre les différents espaces du continent.

En deuxième lieu, nous évoquerons les stéréotypes les plus récurrents parmi ceux observables dans la série. En effet, cette dernière offre à voir une représentation de la communauté latino – la plus grande minorité ethnique des États-Unis, pourtant sous-représentée dans les productions filmiques et télévisuelles états-uniennes (Smith et al. 2018 : 21) – telle que supposément perçue par les États-Uniens, mais également ce que serait la vision de la communauté latino sur elle-même.

Enfin, nous nous intéresserons au racisme et discriminations qu’induit la migration, et à l’acceptation ou au rejet de la communauté immigrée dans la communauté d’accueil, qui conditionnent pour partie l’acceptation ou le rejet de l’héritage culturel et identitaire.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est nécessaire de donner quelques éléments de contexte. Ainsi, la série3 se concentre sur la vie de la famille Álvarez, originaire de Cuba, qui réside à Los Angeles (et non à Miami comme beaucoup d’immigrés cubains représentés dans les séries états-uniennes).

Les protagonistes récurrents évoqués dans ce travail sont :

  • la grand-mère, Lydia, dite « Abuelita » ;

  • la mère de famille, Penélope ;

  • ses enfants, Elena (dite « Blanquita ») et Alex (dit « Papito ») ;

  • Schneider, le concierge de l’immeuble dans lequel vivent les Álvarez, originaire du Canada.

1. À la rencontre d’un voisin méconnu ?

1.1. La frontière entre deux mondes en tension

La série aborde la figure du Cubain, sous plusieurs angles, même s’il est avant tout présenté comme un immigré. À titre d’illustration, dans l’épisode 9 de la saison 1, Papito choisit de présenter un exposé sur Cuba à l’école. Il interroge alors sa grand-mère, qui dit avoir dû « s’enfuir4 » de Cuba (le verbe est fort, il indique un départ rapide et non désiré de la terre natale), pour venir en « América » (l’exil n’a pas gommé la « latinité » ou la « cubanité » de Lydia5, qui continue à s’exprimer en ponctuant d’espagnol ses interventions).

De même, dans l’épisode 5 de la saison 1, Elena et Carmen, sa meilleure amie, préparent un exposé sur l’immigration. Elena, évoquant ce devoir, dit : « Je crois qu’on fonce droit dans le mur ». On comprend ici le lien à faire avec le « mur » visant d’après Washington à stopper l’immigration illégale, qui matérialise en partie la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Le comique de la série sert dans le cas présent à dénoncer la construction d’une barrière entre deux mondes, et l’ironie ou le sarcasme permettent tout au long des saisons de dénoncer certains aspects des relations entre les Amériques.

On observe aussi qu’un mur immatériel se dresse entre les communautés latino et anglo-saxonne, mais que la série peut permettre d’en abattre certains pans. Ainsi, dans l’épisode 13 de la première saison, et parlant de la piste de danse de la salle où doit avoir lieu la quinces6 d’Elena, Lydia dit : « J’ai des gens de ma famille qui se sont enfuis de Cuba sur des radeaux plus grands que ça ». La détresse et la tragédie de l’exil sont détournées en ressorts comiques, ce qui permet au spectateur d’envisager les réalités politico-sociales du continent américain sous un angle qui n’est pas seulement descriptif ou informationnel. Le divertissement devient alors source de réflexion7.

L’épisode 9 de la saison 1 prend une tournure plus dramatique, puisque Carmen ne peut pas rentrer chez elle, car ses parents ont été expulsés vers le Mexique, ce qui lève le voile sur une autre réalité des relations entre les États-Unis et l’Amérique latine. Pour Penélope8, « ils ne les ont pas renvoyés, ils les ont bannis ». Le pronom « ils » est un marqueur discursif de la construction de deux communautés ; il opère une différence tranchée entre deux mondes et matérialise un clivage qui semble insurmontable. Pour le dire autrement, cet « ils » s’oppose implicitement à un « nous », et l’on voit donc que, même pour les citoyens états-uniens nés aux États-Unis, mais d’origine latine, l’intégration n’est pas une évidence. Par la suite, Penélope demande si elle doit conduire l’adolescente voir ses parents « au centre de détention ». Cela nous renvoie à l’aspect délictuel de la migration illégale, et permet de comprendre en partie comment s’opère l’association entre « migrants » et « criminels » dans l’imaginaire collectif.

Tout comme le « Latino », l’évocation de Cuba se fait de différentes manières, qui toutes néanmoins peuvent être reliées à la politique. Il en est ainsi de la nourriture, notamment lors d’un moment que Lydia voudrait partager avec sa fille (saison 3, épisode 8), afin de lui transmettre ses recettes typiquement cubaines. On sait que trouver de quoi se sustenter est un problème majeur et quotidien sur l’île, où les repas ne sont plus synonymes de moments conviviaux partagés, du fait des pénuries parfois très sévères qui y ont cours depuis le début des années 1990 et l’effondrement de l’URSS.

D’ailleurs, la dénonciation des conditions de vie des Cubains et du système totalitaire de l’île apparaît dans de nombreux épisodes, comme lorsque Lydia évoque ses souvenirs :

La Havane, 1962, je n’étais encore qu’une enfant fuyant un régime oppressif […]. Et ensuite, Castro, la Revolución. L’Église catholique avait un programme appelé Pedro Pan, qui invitait les enfants cubains à venir vivre en Amérique en leur fournissant des papiers. Et j’ai répondu à l’invitation en disant « oui ». Je plaisante, il n’y avait pas du tout de coupon réponse (épisode 5, saison 1).

Il convient de souligner ici la référence à l’Opération Peter Pan. Cette dernière, menée par les États-Unis entre 1960 et 1962, est dénoncée par Cuba comme un plan de propagande au travers duquel le gouvernement états-unien diffusa l’idée que les autorités révolutionnaires allaient abolir l’autorité parentale sur l’île. Cette rumeur provoqua le départ de 14 048 enfants et adolescents, qui quittèrent Cuba sans leur famille, pour rejoindre le voisin du Nord (Mummert 2013 : 22). Dans l’épisode 9 de la saison 1, Lydia décrit pour sa part l’Opération comme un « programme commencé pendant la révolution pour exfiltrer les enfants et les mettre à l’abri jusqu’à ce que Castro tombe ». C’est donc ici une vision très négative de la Révolution cubaine qui s’offre au spectateur. Les verbes employés montrent la nécessité de protéger les plus jeunes d’un régime despotique, mais également de lutter contre ce dernier. Très triste alors qu’elle évoque le moment du départ, Lydia avoue par ailleurs qu’elle avait une sœur nommée Blanca, mais que cette dernière est restée sur l’île, car elle avait déjà 19 ans et était donc trop âgée pour partir dans le cadre de l’Opération Peter Pan. Blanca est morte depuis plusieurs années au moment du récit, et Lydia ne l’a jamais revue. Le téléspectateur est donc face à un système sans pitié, qui broie ses enfants et désunit des familles, qui force à un exil dans des conditions matérielles et humaines indignes (Bernardi 2019 : 22). Pour Lydia, si le départ a été un « moment atroce, le pire moment de [sa] vie, [elle est] pourtant contente de l’avoir fait », car elle a réussi à fonder une famille et à vivre la vie à laquelle elle aspirait aux États-Unis.

Ce pays représente donc encore et toujours l’espoir d’une vie meilleure pour les Cubains, en contrepoint de Cuba, qui apparaît comme une île-prison dont l’image peut même être brandie comme une menace. De la sorte, dans l’épisode 5 de la deuxième saison, à sa mère qui lui demande quel métier elle exerce, Penélope répond : « Je fixe le prix des allers simples pour Cuba », sous-entendant qu’elle pourrait expédier sa mère pour un aller sans retour vers un goulag totalitaire. Pourtant, paradoxalement peut-être, au cours de l’épisode 2 de la troisième saison, Penélope est furieuse de découvrir que son fils possède un compte privé sur un réseau social. « Rien n’est privé ici ! C’est une dictature ! », clame-t-elle alors. Ainsi, la vie en communauté et à plusieurs générations (comme cela se pratique couramment à Cuba) abolit certaines frontières, et notamment celles de la vie privée.

La dénonciation des dérives de la révolution se fait également à travers des figures politico-historiques. Ainsi, dans l’épisode 9 de la saison 1, Schneider entre chez les Álvarez, arborant un t-shirt à l’effigie d’Ernesto « Che » Guevara. La famille lui demande alors s’il sait que le Che « n’était même pas cubain », qu’il a « brûlé des livres », « tué des gens », qu’il était « le boucher du peuple ». Penélope ose même une comparaison qui, par son aspect sans doute excessif, montre bien que le sujet est délicat pour la famille : « C’est comme si tu allais chez des juifs avec un t-shirt Hitler ». Quoi qu’il en soit, à l’opposé de l’image du guérillero héroïque, luttant sans peur et sans reproche pour un monde plus juste, qui a également pu être distillée par d’autres canaux, el Che nous est ici dépeint comme le bras armé du système tyrannique mis en place par la famille Castro à Cuba.

En parallèle, apparaît en filigrane au fil des épisodes la méconnaissance qui entoure Cuba et son système politique, mais également l’Amérique latine. En effet, si les auteurs dénoncent sans ambages la Révolution cubaine (Bernardi 2019 : 21), ils pointent également du doigt le manque de connaissances du public, qui l’empêche d’avoir une vision objective de l’île. Cuba n’est pas que le Che (qui est déjà, nous l’avons vu, une figure clivante), le rhum, les cigares9… Les Álvarez permettent de montrer que Cuba est aussi constituée d’un peuple. Dans la saison 2 (épisode 8), on se rend compte de l’étendue de l’ignorance de Schneider concernant le « crocodile vert », lorsqu’il dit à Berto (Roberto, mari de Lydia10) adorer Cuba, et lui demande s’il y retourne souvent. Berto répond alors d’un « non » assez tranchant, précisant : « nous avons été forcés de fuir notre pays ». De la sorte, si le Département d’État classe Cuba parmi les « États autoritaires », ou si la presse états-unienne se fait régulièrement l’écho des violations des droits de l’Homme dans l’île (Lamrani 2021), il semble qu’une partie de la population états-unienne voie avant tout Cuba comme une destination touristique et n’ait pas une idée très précise de son histoire, de sa situation socio-économique, ni même des raisons qui ont conduit à l’adoption d’un embargo que les Cubains nomment blocus.

1.2. L’entre-deux de la communauté cubano-américaine

La série évoque donc les causes de la migration, et plus particulièrement de l’exil pour des raisons économiques et politiques. Mais les manières d’arriver sur le sol états-unien sont également abordées. Pour Scott, le collègue de Penélope, il y a « une bonne et une mauvaise façon d’immigrer », la voie légale constituant la « bonne façon » d’entrer aux États-Unis. Le plus surprenant est que Lydia acquiesce, par un commentaire que l’on penserait presque extrait d’un discours politique xénophobe : « On est déjà trop nombreux dans ce pays, on ne peut pas accueillir tout le monde, vous voulez immigrer dans ce pays, faites la queue » (saison 1, épisode 5). Sa fille est en total désaccord sur ce point, elle lui explique qu’elle a été « accueillie à bras ouverts » aux États-Unis et que de nombreux opprimés dans le monde « voudraient venir ici mais [n’en] ont pas le droit, car les règles ne sont pas les mêmes pour tout le monde »11. La série dénonce donc également le double discours des autorités états-uniennes vis-à-vis des immigrés (Bernardi 2019 : 24), qui conduit à un lien ambivalent entre la famille et son pays de résidence. On l’observe lorsque Penélope, qui est vétéran (elle a servi dans l’armée états-unienne comme infirmière en Afghanistan et a été blessée sur place lors d’un bombardement), essaie de prendre rendez-vous avec un chiropracteur. Mais, selon elle, « de retour au pays » (et elle considère donc les États-Unis comme son pays), les anciens combattants n’arrivent pas à se faire soigner « à cause de l’inefficacité de l’administration » (saison 1, épisode 7).

Parallèlement, l’attachement et même l’amour de la famille pour le territoire états-unien, et pour ce qu’il représente, apparaissent de façon nette dans l’épisode 8 de la saison 2. En effet, Penélope et Víctor (qui est alors son mari) se réengagent dans l’armée après le 11 septembre 2001, alors qu’ils étaient libérés de leurs obligations vis-à-vis du drapeau. Il s’agit d’un acte très fort (d’autant plus que leurs enfants sont encore en bas âge), mais ils l’expliquent par leur souhait de servir leur pays – ce qui ne les empêche pas de se sentir liés à leur territoire d’origine. En somme, la famille Álvarez incarne la communauté transnationale qui s’est formée depuis le début de la Révolution cubaine. Elle représente le lien entre deux espaces géographiques, politiques, culturels, économiques.

La question du pays, du patriotisme, et de l’identité revient avec plus de force dans l’épisode 4 de la saison 2. En effet, on apprend que Lydia ne vote pas. Elena en est scandalisée, elle affirme à sa grand-mère que « c’est la chose la plus importante que l’on peut faire en tant qu’Américain »12, qu’elle n’a de cesse de répéter que les États-Unis l’ont sauvée d’une terrible dictature communiste et qu’elle ne comprend dès lors pas qu’elle n’exerce pas les droits acquis au prix de son exil. Elle lui demande si elle a peur de voter, en précisant que c’est « peut-être parce qu’à Cuba toute prise de position politique était réprimée par la violence ». Plus tard, Abuelita avoue qu’elle n’a en réalité pas la nationalité états-unienne. Sa petite-fille propose alors de télécharger le formulaire de demande de naturalisation, et lui explique qu’il est très important qu’elle le remplisse, car « personne n’est à l’abri » et que les autorités expulsent aussi désormais des Cubains. Lydia s’en offusque et déclare, comme pour insister sur la « valeur ajoutée » de ses compatriotes : « Quoi ? C’est complètement idiot, ils devraient nous importer au contraire ».

Devant l’insistance d’Elena à comprendre pourquoi sa grand-mère ne veut pas demander la nationalité états-unienne, Lydia finit par expliquer que, pour être naturalisée états-unien, elle devra abandonner la nationalité cubaine, et qu’elle ne peut s’y résoudre13. Dans l’épisode précité, Lydia affirme : « Cuba, c’est chez moi ». On voit bien ici le sentiment de double appartenance d’Abuelita, qui sent autant d’attachement pour Cuba que pour les États-Unis.

Malgré tout, l’idée de retourner sur l’île lui est insupportable. Dans l’épisode « Les fantômes », elle déclare : « Mon corps rejette ne serait-ce que l’idée de remettre les pieds à Cuba ! Même si je ne désire rien de plus dans la vie, ce serait beaucoup trop douloureux d’y retourner… ». Une relation d’amour-haine s’installe avec le pays d’origine fantasmé, avec la terre natale rêvée, avec une Cuba pré-révolutionnaire idéalisée (Lonardoni Alves 2022 : 45). Lydia garde cependant l’espoir de transmettre quelque chose à ses descendants, car elle a conservé le titre de propriété de la maison familiale située à Cuba. Penélope, pour la rassurer, lui dit qu’elle a apporté Cuba avec elle, qu’elle a transmis la cubanité à sa famille. Alex et Elena soulignent pour leur part qu’ils sont fiers d’être cubains. L’épisode montre bien une transmission, un héritage assumé, voire revendiqué, et l’identité cubaine est alors un élément positif de la construction identitaire de chacun des protagonistes.

Un dernier obstacle survient cependant lorsque Abuelita est victime d’une attaque, alors qu’elle n’a pas encore officiellement reçu la nationalité états-unienne (saison 2, épisode 13). Son mari décédé vient alors la chercher, dans ses songes, tandis qu’elle est à l’hôpital. « Je dirais que tu as fait ça pour rester cubaine jusqu’à la fin », lui dit-il. En somme, mourir avant d’avoir obtenu les documents officiels attestant de sa nationalité états-unienne et d’avoir assisté à sa cérémonie de naturalisation serait une forme d’échappatoire.

2. Une auto-description supposée de la « communauté latino »

2.1. Quelques fondements de la latino-américanité et de la cubanité

Pour évoquer à présent ce qui apparaît comme un autoportrait de la famille Álvarez, et par extension ce qui serait la vision de la communauté latino et cubano-américaine sur elle-même, précisons que dès le premier épisode de la saison 1, Abuela apprend à Penélope que sa « fille ne veut pas de quinceañera » alors que, selon elle, il s’agit d’un rite de passage obligé pour « devenir une femme ». Pour Elena, il s’agit d’un « rituel culturel misogyne », et lorsque sa grand-mère l’accuse de rejeter son héritage cubain, elle répond fermement : « Oui, la partie qui ne me plaît pas ». Ainsi, les traditions, le machisme et la société patriarcale apparaissent tout au long de la série comme des composants de la culture et de l’identité « latino », ce que la jeune génération tend cependant à remettre en question.

Ces thèmes sont soumis au regard du public à travers un humour mordant, comme lorsque l’ex-mari de Penélope, Víctor, affirme qu’il est fort, car « il vient de finir l’armée » et que son beau-père Berto lui répond : « Je me suis échappé de Cuba, c’est moi le plus fort ». Ce sont les stéréotypes sur la « virilité » et l’esprit putativement phallocratique de l’homme « latino » qui sont alors mis en exergue, et qui permettent à nouveau de mentionner la question des droits humains sur l’île. Mais apparaît également, de façon antithétique, le caractère « bien trempé » de la femme cubaine, comme lorsque Abuelita sort une machette pour aller couper les racines d’un arbre dans lesquelles elle s’est pris les pieds (saison 2, épisode 4).

La cubanité est donc perceptible à travers des traits de caractère présentés comme intrinsèquement cubains. Par exemple, les Álvarez insistent au fil des épisodes sur la force tant physique que morale des Cubains, capables de tout en toutes circonstances (saison 2, épisode 6). Cela est confirmé dans l’épisode 9 de la saison 2, lorsque Penélope, en proie à une profonde dépression après l’arrêt de sa thérapie et de ses médicaments sans avis médical (elle est victime d’un syndrome post-traumatique), dit à sa mère : « Je sais que mon cerveau cubain devrait être capable de combattre la maladie comme un matador prêt à affronter le taureau ». Lydia, de son côté, déclare que si elle devait tomber malade un jour, « son sang cubain dévorerait et absorberait la maladie jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien » (saison 1, épisode 8). Les allergies sont d’ailleurs une invention pour Abuelita, elle qui a subi une attaque cardiaque mais balaie ce souvenir d’un « ce n’était rien ». Elle incarne la Cubaine forte, digne, courageuse, qui lutte sans se plaindre, la femme latine que rien ne peut détruire14, qui se soigne avec du bouillon de poule et refuse de dire qu’elle est désolée, car cela équivaut à un aveu de faiblesse.

2.2. La famille

Le regard porté sur eux-mêmes par les Álvarez touche également la sphère familiale, la co-créatrice de la série Gloria Calderón Kellett ne se cachant pas d’avoir transféré à l’écran des représentations de sa propre famille (Piquet 2002). Apparaît ainsi par exemple, et de façon récurrente, l’idée de l’assistance à porter aux membres de la famille, et particulièrement aux plus âgés : « Chez nous, on ne met pas les anciens dans des maisons [de retraite] », disent Lydia et Penélope (saison 2, épisode 9). De la sorte, puisque le fait de s’occuper des parents ou grands-parents, sans être une caractéristique exclusive des Cubains, est la norme à Cuba, la mère et la fille esquissent le portrait d’une « famille typique » cubaine, au sein de laquelle les jeunes générations assument leurs aînés, sans se poser de questions, car cela est « naturel ».

On notera l’utilisation de la locution « chez nous », qui marque à nouveau la construction à travers le discours de deux espaces, l’un formé par le « nous » et l’autre par le « eux ». La question qui se pose alors est : où situer cet espace, ce chez-soi ? Où est la frontière, la limite entre le Soi, le Nous et les Autres ? Sommes-nous face à une référence à une communauté culturelle et identitaire plus que géographique ? Car la cubanité n’est pas qu’une question d’origines, comme le montre la scène durant laquelle Schneider s’occupe d’Alex et l’emmène à un entraînement sportif. Il échange avec d’autres parents et explique l’importance de la famille pour les Cubains. L’un des autres parents lui demande s’il est lui-même cubain, ce à quoi il répond : « Pas de naissance, mais spirituellement je m’identifie aux Cubains. C’est pour ça que je suis protecteur à l’excès, nous on est comme ça. Je crois qu’on a du mal avec la confiance à cause de Castro et tout ça » (saison 1, épisode 11).

Ainsi se pose la question de l’identité au sein de la famille Álvarez, mais également parmi le public. On observe effectivement que le personnage de Lydia, grand-mère hispanique excentrique, est considéré sur les forums de fans de la série comme « le portrait craché de toutes les grands-mères latines », image projetée qui divise le public, certains disant l’adorer quand d’autres affirment détester ce qu’elle représente15. Si l’on considère que « le récit comme forme d’enquête sociologique est un outil de comparaison permettant de se situer par rapport à une norme », on peut alors penser que le spectateur est tenté de trouver dans la série un écho à sa propre vie, afin de « valider son identité » ou de « se remettre en question » (Tomb 2017 : 93).

La famille cubaine est en substance décrite comme un cocon, en faire partie assure de ne jamais être seul, dans tous les sens du terme. Ainsi, dans l’épisode 13 de la saison 2, et alors que les Álvarez sont à l’hôpital après l’attaque de Lydia, l’infirmier leur explique qu’ils vont devoir rentrer chez eux, en déclarant : « C’est probablement le moment de vous dire que c’est la fin des heures de visite ». Penélope éclate alors de rire et rétorque : « Et c’est probablement le moment de vous dire qu’on est cubains ». Cela signifie qu’ils ne partiront pas, qu’ils resteront en famille au chevet de la malade, la veilleront, à tour de rôle mais en se sachant tous unis, faisant de la famille cubaine un espace social de solidarité et d’entraide.

En somme, la famille cubaine suppose un soutien constant, et son corollaire, une présence permanente. Tout Cubain digne de cette appellation semble se faire un devoir de se consacrer avant tout à sa famille. Ainsi, lorsqu’Elena essaie sa robe de quinces, le fait qu’elle soit contente sans pour autant être émue aux larmes implique une rupture de la tradition et de la « normalité » des choses pour la grand-mère qui se sent coupable de n’avoir pas su confectionner le vêtement adéquat pour sa petite-fille. Elle lance alors cette réplique d’un ton dramatique : « J’ai trahi ma famille, j’ai trahi Cuba » (saison 1, épisode 13).

2.3. Le bouillonnement cubain

Un autre préjugé exploité par la série est celui de l’exubérance cubaine. Ainsi, lorsque Penélope affirme qu’« en tant que cubaine, [elle souffrira] en silence », son patron lui répond : « Une Cubaine silencieuse ? J’aimerais bien en rencontrer une ! » (saison 1, épisode 1). Lydia corrobore cela dans un autre épisode, lorsqu’elle explique qu’« un Cubain silencieux est le plus dangereux des Cubains » (saison 3, épisode 10). Le Cubain est donc présenté comme un être bruyant, ou à tout le moins expansif.

Par ailleurs, dans l’épisode 2 de la saison 1, Schneider vient voir Lydia pour obtenir des conseils sur la façon de danser la salsa. En entrant dans l’appartement, la famille trouve les deux protagonistes précités en train de danser. Elena s’exclame : « Oui c’est bon, j’ai compris, on est cubains ! », comme si tous les Cubains passaient la plupart de leur temps à danser. Puis elle interroge sa mère : « C’est normal d’être un tel stéréotype vivant ? ». Penélope se met alors elle-même progressivement à danser en évoquant « son sang chaud cubain qui bouillonne », et ne lui laisse donc aucune autre possibilité que de suivre le rythme de la musique.

On peut encore citer l’épisode 3 de la première saison, lorsque Lydia commence sa journée « à la cubaine », en dansant au rythme de la chanson Azúcar negra, interprétée par Celia Cruz16, dont les paroles évoquent l’identité cubaine. La scène est répétée dans l’épisode 2 de la saison 2, ce qui amène à penser que la musique fait partie intégrante de la vie des Cubains, et peut-être plus largement des « Latinos ». Le Cubain aurait donc l’esprit festif dans le sang, ce qui se matérialise dans sa relation avec la musique et la danse, et « faire la fête » serait un aspect essentiel de la vie quotidienne des individus mais également de la collectivité.

D’ailleurs, les festivités et la danse sont une expression de l’identité, et contribuent à caractériser les communautés culturelles. De cette façon, dans la saison 3 (épisode 13), Lydia dit apprendre une danse « d’une autre culture » : la danse des canards (et elle précise qu’elle supportera le ridicule, maintenant qu’elle est américaine). À nouveau, le regard porté sur soi implique un regard en miroir sur l’Autre, même pour les membres d’une communauté dont le cœur bat des deux côtés du Détroit de Floride, et pour le spectateur, « le fait de fréquenter des personnages de séries très différents permet […] de provoquer […] des débats de conscience et des dilemmes éthiques, ils nous font réfléchir à l’humanité » (Tomb 2017 : 94).

3. Racisme, discriminations et conséquences

3.1. Un racisme omniprésent

Ces regards croisés entre communautés impliquent bien souvent des jugements. En conséquence, on voit que le racisme touche la famille Álvarez de différentes façons, et qu’au sein même de la « communauté latino », des discriminations apparaissent. En effet, la série montre que les Latinos se reconnaissent comme membres d’une communauté latino-américaine, tout en distinguant des caractéristiques propres à chaque identité nationale. C’est ainsi que Lydia reconnaît un Colombien à sa manière de chanter, ou que Mateo, lui-même d’origine colombienne et père d’un camarade d’Alex, se disputant avec Penélope au sujet de l’éducation des enfants, affirme que les Colombiens sont plus protecteurs que les Cubains (saison 3, épisode 6). Penélope, vexée, lui rétorque alors que les Colombiens ne sont célèbres que pour le trafic de drogue17.

De nombreux épisodes de la série sont saupoudrés d’anecdotes qui montrent combien le racisme est présent, s’insinue partout, et n’est pas constitué uniquement d’insultes ou d’agressions physiques. Il peut être plus insidieux. Ainsi, Madame Doyle, patiente du cabinet médical dans lequel travaille Penélope, appelle cette dernière « María » (saison 1, épisode 1). Les Latinas semblent toutes porter le même prénom, ce qui conduit à l’anonymisation, à la discrimination envers un peuple sans imagination, car incapable de se donner une identité, si ce n’est à travers quelques prénoms bibliques (apportés, donc, par les colons espagnols).

À ce sujet, on note que les noms à consonance hispanique sont liés à des métiers de service (le chauffeur de la famille de Schneider s’appelait Paco). On diffuse donc plutôt une image de « servitude » de la communauté latino, en montrant qu’elle occupe des emplois peu qualifiés. Il s’agit d’une réalité, particulièrement pour les femmes, « la transformation de l’économie des villes californiennes [ayant] créé un effet d’appel de main-d’œuvre bon marché dans le secteur des services à la personne » et « les Latinas [étant en conséquence] souvent “domestiques”, femmes de ménage ou gardes d’enfants pour les classes moyennes et aisées de San Francisco ; employées dans la restauration et le tourisme à San Diego ; ou bien exploitées dans les sweat-shops du textile à Los Angeles » (Le Texier 2007). On pourrait tout de même nuancer l’affirmation au regard de la réalisation professionnelle de certains protagonistes de la série étudiée, à l’instar de Penélope.

Mais l’image est tenace, comme le montre l’épisode 7 de la saison 3. Abuelita fait la queue pour acheter à Papito un modèle de chaussures onéreux récemment mis sur le marché. Face à l’homme qui a obtenu les dernières paires en stock, une cliente défend la grand-mère, expliquant qu’elle a dû économiser très longtemps pour se les offrir. Un autre client rebondit alors : « Ouais mec, fais pas ton raciste, donne ces baskets à la boniche », confirmant par l’emploi du terme péjoratif que, dans l’esprit d’un grand nombre d’États-Uniens, le Latino d’origine ne peut obtenir un emploi hors du cadre de la domesticité. Cela n’entame en rien la bonne humeur de Lydia, qui triomphe poing levé, en s’exclamant « pa’lant »18.

3.2. Une fougue qui dérange

La série montre par ailleurs à différentes reprises que les termes associés à la communauté latino d’après les États-Uniens sont excentricité, exubérance, bruit – nous avons vu que les Álvarez se perçoivent comme démonstratifs et extravertis, ce qui est moins péjoratif. Ainsi lors d’un match de baseball d’Alex, la famille chante haut et fort une petite rengaine (« Dale papito, dale »19), qui plonge ce dernier dans la honte (saison 2, épisode 1). Elena en est gênée également, ce qui pousse à penser que la nouvelle génération serait moins encline à assumer le côté « festif » associé à la cubanité20. On apprendra par la suite que c’est pour ne pas être victime de racisme qu’Alex ne veut plus que sa famille vienne le voir au match : « Je suis fier d’être cubain, mais… », dit-il – et la conjonction de coordination parle d’elle-même. Penélope dit à son fils qu’il est cubain ET américain. De son côté, Abuela assume totalement son identité cubaine, elle qui sort de son sac le drapeau cubain « qu’elle a trouvé au supermarché ».

Face à cette cubanité bondissante, et alors que la famille fête la victoire de l’équipe d’Alex au restaurant, des convives assis à une autre table demandent aux Álvarez, de façon assez déplaisante, de parler moins fort : « Je sais que vous faites une petite fiesta entre vous, mais vous devriez apprendre à parler moins fort, vous n’êtes pas tout seuls ici ». Penélope y voit un sous-entendu sur le caractère latino trop extravagant, et donc dérangeant dans le monde anglo-saxon. Elle se défend, répond qu’elle est américaine (Lydia précise « cubano-américaine »), qu’elle a les mêmes droits que ses concitoyens et qu’elle a rempli ses devoirs envers son pays plus largement que d’autres. Abuelita explique pour sa part que c’est « la passion » qui fait que les Latinos parlent fort, et ce terme redonne un aspect positif à la « théâtralité » des Álvarez : ils sont alors des êtres enthousiastes, entiers, heureux de vivre.

En rentrant chez eux, ils continuent à chanter, y compris Elena. Tout le monde est surpris qu’elle aime le sport et elle répond que ce n’est pas pour cela qu’elle chante, mais « parce qu’elle est fière de son héritage, de ses racines cubaines ». L’épisode montre donc comment, malgré les attaques, les remarques ou les regards réprobateurs, la famille dans sa totalité, bien qu’à des degrés divers et à travers des expressions différentes, est nourrie d’une cubanité, voire d’une latino-américanité vécue comme une chance et une force.

3.3. La langue

Un autre élément de la définition de l’identité est la langue. On observe qu’Elena ne maîtrise pas l’espagnol, à la différence de son frère, qui l’utilise pour communiquer avec leur grand-mère (et parfois se moquer d’Elena). L’héritage cubain n’est pas transmis de la même façon au petit-fils et à la petite-fille, la grand-mère ne se cache pas d’avoir une nette préférence pour le varón, c’est-à-dire « l’héritier mâle », celui qui va « assurer la lignée ». Mais plus que la valorisation de l’individu de sexe masculin, c’est l’explication que donne Elena de la situation qui est intéressante ici : elle confie à sa grand-mère qu’elle a arrêté de parler espagnol, car cette langue n’était pas un moyen de communication pour elle. La jeune fille percevait plutôt la langue de Cervantès comme synonyme de disputes, puisque c’est en espagnol que Lydia « criait » sur Penélope, lui assénant par exemple : « Ta fille elle sait même plus parler espagnol, elle a perdu sa cubanidad » (saison 2, épisode 13).

Schneider, tout au contraire, n’hésite pas à s’exprimer en espagnol. À une Elena étonnée de le voir commander à manger dans cette langue, il explique qu’il a appris l’espagnol pour être « encore plus performant comme membre de la famille » (saison 2, épisode 1). Autrement dit, c’est Schneider, l’immigré canadien, qui cherche alors à s’intégrer au sein d’une famille cubano-américaine, et devient la minorité cherchant à s’assimiler.

Dans l’épisode 3 de la saison 3, Penélope participe avec Mateo à une vente aux enchères au profit de l’école de leurs enfants. Alors qu’ils échangent en espagnol, une mère d’élève leur dit qu’ils sont « trop mignons à parler dans leur langage secret ». La condescendance infantilisante du personnage secondaire démontre en outre un manque de culture générale, qui se retrouve lors de la première rencontre entre la famille et Schneider. Celui-ci leur demande : « Vous êtes des Mexicains non ? Je reconnais le jargon » (épisode 8, saison 2). Schneider ne cherche pas à être blessant, il se montre surtout maladroit et ignorant, opérant au passage un basculement de l’hyperonymie, puisque tous les Latinos deviennent des Mexicains.

Au demeurant, les Mexicains paraissent cristalliser les tensions raciales tout au long de la série. Ils représentent sans doute le « péril latino », étant originaires du pays frontière, de la zone tampon entre la « civilisation » et le « sous-développement ». Rappelons que l’action se déroule à Los Angeles, et qu’« en Californie, les Latinos d’origine mexicaine forment l’immense composante de [la] population [latino] (plus de neuf millions), les autres groupes importants étant originaires d’Amérique centrale (830 000), les Sud-Américains (175 000), les Portoricains (170 000) et les Cubains (70 000) » (Le Texier 2007).

L’illustration la plus marquante pour notre propos survient lorsqu’Alex frappe un autre élève lors d’une sortie scolaire. Effectivement, le garçon en question a suggéré à Papito de « rentrer chez [lui] au Mexique » parce qu’il parlait espagnol avec un camarade. Alex explique alors à sa mère et à sa grand-mère que cela lui arrive souvent ; on l’a déjà appelé : « bouffeur de fayots », « wet back », « racaille de gang », etc.

3.4. Un racisme institutionnel

Si, pour Penélope, le racisme « la plupart du temps, c’est de la bêtise », Elena a une autre explication : « Un type a traité tout un groupe de Latinos de criminels et de violeurs, n’importe qui se sent autorisé à être raciste et xénophobe » (saison 2, épisode 1). Faisant référence aux diatribes de Donald Trump21, elle nous montre ici que le racisme peut être institutionnalisé via le discours politique, ce qui engendre une fracture au sein de la communauté latino elle-même. Penélope affirme ainsi : « “Bouffeur de haricots”, c’est une insulte pour les Mexicains », jouant la carte de la différence entre les identités latinos. Lydia confirme et demande pourquoi on les traite de Mexicains. Le verbe « traiter » montre bien qu’être considéré comme Mexicain est une insulte. En outre, la grand-mère précise plus tard, dans un nouvel élan de chauvinisme, que ce sont les Cubains qui produisent les meilleurs haricots.

Enfin, la série pose la question du privilège blanc. Elena n’a jamais été insultée, parce que, d’après sa famille, elle est très blanche de peau. On voit cependant apparaître une forme de discrimination positive, en faveur de la communauté hispanique (saison 1, épisode 9). En effet, Elena obtient une bourse pour intégrer un programme scolaire, mais est déçue car c’est en tant que « candidate de la diversité ». La grand-mère trouve de son côté que « ce n’est pas trop tôt d’être récompensés parce qu’ils sont originaires de Cuba ». En parallèle, Penélope décrit un traitement différent entre elle et une amie blanche alors qu’elles avaient été arrêtées, adolescentes, en possession de marijuana (saison 3, épisode 5). Elle évoque implicitement une solidarité communautaire, un policier latino au commissariat l’ayant aidée tout en lui précisant qu’elle devait être exemplaire, car les règles n’étaient pas les mêmes pour les Blancs et les Latinos.

Mais la série va plus loin encore, car dans l’épisode 9 de la saison 1, Schneider avoue qu’il est immigré clandestin, depuis… le Canada. Il précise qu’il préfère le terme « sans papier » pour parler de sa situation. La famille se moque affectueusement de lui, car elle le voit malgré tout comme un privilégié – la différence dans le statut d’immigré repose ici sur son origine, sa langue maternelle (les Álvarez considèrent qu’il est plus facile pour un Canadien de s’intégrer dans la société états-unienne, puisqu’il en maîtrise la langue) et son pouvoir d’achat. Schneider est une sorte de symbole, du fait qu’il représente la différence de traitement entre les immigrés vivant sur le sol états-unien. On notera tout de même la réplique ironique d’Alex au sujet de « l’accent canadien » de Schneider (épisode 4, saison 2) : « J’ai rien contre les étrangers qui s’installent chez nous, mais ils pourraient au moins apprendre la langue ».

L’opinion la plus surprenante sur cette question est encore émise par Lydia, qui affirme sans sourciller : « Nous les Cubains, on est blancs. En majorité, on descend des Espagnols, on est blancs de souche ». Fait surprenant, Lydia pense même que la couleur de peau détermine le niveau de « civilisation », et c’est sans doute pour cela qu’elle cherche à plusieurs reprises à se « blanchir » et à « blanchir » sa famille (la pire insulte qu’elle dit avoir reçue est « moricaude »), comme si la limite entre civilisation et barbarie – thème de réflexion de nombreux penseurs originaires du sous-continent – se trouvait dans la pigmentation de l’épiderme. Pour la grand-mère, les Cubains sont donc « latinos » par leur ascendance latine, leur lien avec l’Europe, et la latinité n’est de ce fait pas vue par tous comme un syncrétisme, un métissage, une symbiose, ce qui nous montre combien l’Amérique latine demeure aussi une inconnue pour elle-même.

Conclusion

En préambule à toute conclusion, signalons qu’une saison 4 a été diffusée aux États-Unis, mais qu’elle n’est à ce jour pas disponible pour le public français. Une étude complétée sera à mener lorsque cela sera possible, car le cliffhanger du dernier épisode de la saison 3 nous apprend que Lydia, qui est censée être à Miami, se trouve en fait… à Cuba22.

Sur les trois premières saisons, nous avons observé qu’une image était bel et bien donnée de « la » famille cubano-américaine, et même plus largement latino-américaine. Commentant la suspension de la série23, Justina Machado, l’interprète de la mère de famille, écrivait d’ailleurs sur Twitter le 14 mars 2019 : « Certes, il s’agissait d’une famille latinx, mais c’était une histoire universelle sur la famille et l’amour. Une familia américaine »24. L’actrice mettait alors en exergue par le mélange des langues les deux cultures auxquelles se sent appartenir la famille Álvarez, en plus d’insister sur la famille comme valeur fondamentale tant du monde anglo-saxon que latino.

La famille protagoniste est symbolique, elle renvoie à certains clichés concernant un mode de vie et une identité culturelle (exubérance, liens familiaux…), ce qui amène le spectateur à rire et à réfléchir. Si des problématiques sociétales et des thèmes actuels, tels l’immigration clandestine, la nostalgie d’une Cuba passée (Bernardi 2019 : 21) et la douleur du déracinement, sont abordés, la série utilise nombre de ressorts comiques afin de donner à voir la vie quotidienne et les difficultés d’une « famille type » latino, faisant de One day at a time une dramédie.

En outre, la série fait partie de « productions audiovisuelles grand public [qui] reflètent une société civile où les Euro-Américains n’ont pas le monopole des rôles proactifs et de la complexité psychologique » (Chane et al. 2022 : 143). En parallèle et en creux, la série dénonce la représentation dans l’imaginaire collectif occidental du Latino par essence délinquant ou domestique. Il nous semble donc que la série est un instrument à double tranchant ; elle peut être un canal de diffusion d’images, mais également un moyen de lutte contre les préjugés et la discrimination, même si comme objet d’étude, elle est soumise à des biais :

Outre la quantité et l’instabilité de la production et de leurs conséquences respectives sur la réception, surgit le problème de l’excellence narrative et esthétique de certaines séries puisque tout y est totalement déconstruit et réfléchi : les stéréotypes sont à la fois présents et remis en question ; les points de vue sont tous représentés et incarnés par différents personnages par ailleurs tous complexes et contradictoires ; toutes les interprétations sont possibles, y compris les plus incompatibles entre elles (Berton et Boni 2019).

Quoi qu’il en soit, nous avons observé qu’une réelle fierté – relative aux racines, à travers la langue, des anecdotes historiques, la musique ou les nombreuses références à Cuba – était véhiculée par la sitcom. Même si l’écriture du scénario répond à une logique commerciale, et doit avant tout satisfaire un public de plus en plus demandeur de diversité (Chane et al. 2022 : 114), One day at a time n’apparaît pas uniquement comme un divertissement à consommer sans réfléchir. La série donne bien à voir l’image d’un peuple, et non uniquement d’une population, uni par une matrice commune (une identité et une culture) qui n’empêche malgré tout pas l’attachement au pays d’accueil. Cela étant, on voit clairement au fil des épisodes que la méconnaissance et la méfiance règnent encore entre les mondes anglo-saxon et hispanique.

D’autre part, la série offre une certaine vision de Cuba et de son système politique, vision très négative, mais elle remet également en cause l’attitude de Washington quant aux immigrés. Sans provoquer de débats nouveaux, elle donne tout de même matière à penser aux jeunes générations sur de nombreux sujets, comme « le voyage vers la citoyenneté américaine, le changement de perspective [sur Cuba et sa Révolution] entre les générations, les critiques contre la présidence de Donald Trump, et même les débats sur l’existence de Dieu » (Avilés-Santiago 2019 : 70). Ainsi, tout en tenant compte de l’« espace intermédiaire qui se situe entre la représentation et la réception » (Berton et Boni 2019), sans le dire, la série pose les questions de l’hybridité et de la fusion culturelle, mais aussi de la non-acculturation.

Elle nous présente également un autoportrait, qui, bien que fictionnel, permet une réflexion sur l’auto-perception de la communauté latino, et sur l’assimilation de certains clichés qui semblent devenir des caractéristiques intrinsèques à une identité culturelle sous-continentale, alors même que l’identité est en perpétuel mouvement (Lonardoni Alves 2022 : 49).

Enfin, la série décrit la réalité du quotidien d’individus qui, malgré leur souhait d’inclusion, se voient rejetés par la communauté d’accueil du fait de leurs origines, insistant sur la question politico-sociétale du racisme, toujours prégnante aux États-Unis aujourd’hui. Apparaît alors l’entre-deux de l’exil, car la communauté de départ rejette parfois le migrant tout autant que la communauté d’arrivée, faisant de lui un errant.

Bibliography

Ouvrages et articles

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Filmographie

Act III Productions, Snowpants Productions, Small Fish Studios, Sony Pictures Television, One day at a time, 2017-2020, 46 épisodes

Épisodes mentionnés

Saison 1 (2017) :
1 : La Quinceañera
2 : Sexistes
3 : La dispute
5 : Meilleures amies
6 : Adieu Mme Resnick
7 : Ne quittez pas, s’il vous plaît
8 : Au fil des mensonges
9 : Viva Cuba !
13 : Princesse d’un jour

Saison 2 (2018)
1 : Le Grand Tournant
2 : Les études
4 : Racines
5 : Bloqués
6 : Trouve-toi un job !
8 : Ce qui s’est passé
9 : Salut, Penélope
12 : Lydia l’Américaine
13 : Pas encore

Saison 3 (2019)
1 : Un enterrement providentiel
2 : À l’extérieur
3 : Les enchères
5 : Couper l’herbe sous le pied
6 : Au fil des jours de la Saint-Valentin
7 : La première fois
8 : Zéro de conduite
9 : Les crises d’angoisse
10 : Les cuticules
13 : Les fantômes

Notes

1 « It offers a realistic portrayal of Latinos, who are typically shown in film and TV as gang members or servants, or on the news as undocumented immigrants. In short, this is the TV show America needs right now » (Reyes 2018). Traduction de l’auteure. Return to text

2 Gloria Calderón Kellett, qui est d’origine cubaine, et Mike Royce, États-Unien. Return to text

3 Elle comporte en tout 4 saisons, soit 46 épisodes d’une trentaine de minutes chacun. Return to text

4 Les citations retranscrites dans ce travail sont celles de la version française. Return to text

5 Incarnée par la portoricaine Rita Moreno, première hispanique à remporter un Oscar – meilleur second rôle féminin – en 1962 pour West Side Story. Return to text

6 Quinces ou quinceañera : fête traditionnelle que l’on retrouve dans de nombreux pays latino-américains, qui rassemble la famille pour célébrer le passage à l’âge adulte d’une jeune fille. Return to text

7 La consultation de critiques rédigées par des téléspectateurs le prouve. Voir https://www.senscritique.com/serie/au_fil_des_jours/critique/119179163. Return to text

8 Incarnée par une actrice née aux États-Unis et d’origine portoricaine. Return to text

9 Même si dans l’épisode 6 de la saison 1, « Adieu Mme Resnick », Lydia boit du rhum dans la nouvelle voiture de Penélope en disant que « c’est exactement comme quand [elle] était petite à Cuba ». Return to text

10 Incarné par l’acteur Tony Plana, né en 1952 à La Havane. Return to text

11 On peut, à ce sujet, rappeler qu’entre mai 1995 et janvier 2017, la loi dite « pieds secs, pieds mouillés » en vigueur aux États-Unis opérait une différence entre les migrants cubains interceptés en mer et ceux réussissant à fouler le sol états-unien. Return to text

12 Par ailleurs, l’emploi du terme « Américain » peut faire débat, l’Amérique étant un continent. Return to text

13 Une précision s’impose ici : si la Constitution de 1976 ne permettait pas aux Cubains de bénéficier d’une double nationalité (« En conséquence, lorsqu’une personne obtient une citoyenneté étrangère, elle perd la citoyenneté cubaine » art. 32), celle-ci a été abrogée en 2019 et l’article 36 précise désormais que « l’acquisition d’une autre citoyenneté n’implique pas la perte de la citoyenneté cubaine ». Return to text

14 Il s’agit d’une représentation de la femme latina que l’on retrouve dans d’autres séries. On pense par exemple à Gloria dans la série Modern Family, qui refuse d’aller à l’hôpital pour une « simple épaule déboîtée » (saison 2, épisode 9). Return to text

15 Voir par exemple https://one-day-at-a-time.fandom.com/wiki/Lydia_Riera. Return to text

16 Iconique chanteuse cubaine, elle quitta l’île dès 1960 pour les États-Unis. Return to text

17 Ce à quoi Mateo répond sur un ton agacé : « On a aussi le café, et Shakira ! ». Return to text

18 Construction à partir de « para » et « adelante », signifiant « en avant », très utilisée dans l’espace caribéen (Cuba, Porto Rico, Colombie…). Return to text

19 « Allez mon petit Alex, allez ». Traduction de l’auteure. Return to text

20 Les commentaires émis par les spectateurs sur certains sites sont à ce sujet intéressants : « La mère sert à montrer le décalage culturel entre une “vraie” Cubaine et les deux autres générations de la famille, permettant ainsi d’aborder la question du décalage culturel de manière intelligente » (https://www.senscritique.com/serie/au_fil_des_jours/critique/117087675). Return to text

21 On pense au discours du 16 juin 2015 de celui qui était alors candidat à l’élection présidentielle. Return to text

22 Saison 3, épisode 13, « Les Fantômes » Return to text

23 Netflix avait décidé d’annuler la série en 2019, mais les protestations des fans ont permis en 2020 la réalisation de la quatrième et ultime saison, diffusée sur la chaîne états-unienne Pop. Return to text

24 « Yes it was a Latinx family but it was a universal story about family and love. An American Familia ». Traduction de l’auteure. Return to text

References

Electronic reference

Janice Argaillot, « L’image projetée du « Latino » dans la série One day at a time (Au fil des jours) », Textes et contextes [Online], 19-2 | 2024, 15 December 2024 and connection on 12 March 2025. Copyright : Licence CC BY 4.0. URL : http://preo.ube.fr/textesetcontextes/index.php?id=5223

Author

Janice Argaillot

Université Grenoble Alpes, laboratoire ILCEA4 (EA 7356)

Copyright

Licence CC BY 4.0